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19 décembre 2011 1 19 /12 /décembre /2011 21:39
Proust, leurres et appâts de l’amour, puissance de l’imagination
Proust est, sans doute, le plus impitoyable dans la description et l’analyse des leurres et appâts de l’amour. Saint-Loup veut présenter au narrateur son amie. Ils partent à sa rencontre dans un village de banlieue. « Jamais Robert ne me parla plus tendrement de son amie que pendant ce trajet. Je sentais que, seule, elle avait des racines dans son cœur; l’avenir qu’il avait dans l’armée, sa situation mondaine, sa famille, tout cela […] ne comptait en rien […] il n’avait de considération, de souci, que pour ce qui la touchait. Par elle, il était capable de souffrir, d’être heureux, peut-être de tuer ». Or ( mais il faut revenir en arrière de plusieurs tomes ) le narrateur reconnaît tout de suite en celle-ci « Rachel quand du Seigneur » ( ainsi nommée par lui par référence à l’opéra de Jacques François Halévy ) que lui proposait continuellement une tenancière de maison close à laquelle il avait donné le grand canapé de sa tante Léonie ( celle de la petite madeleine )! Il comprend que ce qu’il n’avait pas voulu pour vingt francs était maintenant devenu objet d’inquiétude, de tourment, «  de souffrances infinies, ayant le prix même de l’existence ».
Il entame alors la réflexion suivante : « Je me rendais compte de tout ce qu’une imagination humaine peut mettre derrière un petit morceau de visage comme était celui de cette femme, si c’est l’imagination qui l’a connue d’abord; et inversement, en quels misérables éléments matériels et dénués de toute valeur pouvait se décomposer ce qui était le but de tant de rêveries, si, au contraire,cela avait été perçu d’une manière opposée, par la connaissance la plus triviale ».
L’amorce de l’amour ne vient donc, selon Proust, que d’un leurre de l’imagination.

Key word

: leurres et appâts de l’amour, racines dans le cœur, capable de souffrir d’être heureux peut-être de tuer, « Rachel quand du Seigneur », opéra, tenancière de maison close, les souffrances infinies les inquiétudes les tourments de l’amant, l’imagination humaine, dissociation entre les rêveries et la connaissance triviale, l’amorce de l’amour un leurre de l’imagination.

Key names

: Proust, Robert de Saint-Loup, Rachel quand du Seigneur, tante Léonie; Jacques François Halévy.

Key works : Le côté de Guermantes

( Proust ); le chant d’Eléazar dans l’opéra de Jacques François Halévy : « Rachel quand du Seigneur la grâce tutélaire… ».
L’île de notre nostalgie ( 2.1.e ).
Patrice Tardieu
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commentaires

J
<br /> Très cher Patrice Tardieu<br /> "L'amorce de l'amour ne vient donc, selon Proust , que d'un leurre de l'imagination"... je crois que tout est dit. Toutefois, l'amour n'est pas un leurre pour autant !<br /> Rêver l'amour ou l'amour en rêve, n'est-ce pas là l'acte d'une pensée similaire ? Jeanne<br />
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P
<br /> <br /> Très chère Jeanne,<br /> <br /> <br /> il y a des nuances subtiles à garder.<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> Ah non, cher ami, juste pris par une longue conversation avec une dame, et le temps (qui semble plus court que "perdu" est à rechercher dans le kairos fait que je rêve beaucoup, m'attelant aussi<br /> à l'écriture d'un roman , plus les tâches ménagères, les repas, etc...du célibat).., il m'en faudrait plusieurs afin de bien pouvoir vous "suivre" au plus juste, au mieux... Pour le Lacan, je<br /> crois qu'il s'agissait peut-être du LIVRE 1 / Parole vide et parole pleine dans la réalisation psychanalytique du sujet, à moins que du Séminaire sur Le Moi et Freud....<br />
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P
<br /> <br /> Cher ami,<br /> <br /> <br /> merci pour ces indications.<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> Il est l' Heure "des appâts de l'amour" sitôt rêve-t-on à ce qu'on n'aura jamais, ou à ce qu'on ne peut atteindre... Rêver l'amour ou faire l'amour ou attendre l'amour ou patienter l'amour à plus<br /> d'une espérance, c'est encore se leurrer sur la Vérité de cet amour , Janus à plus de deux visages ! Puisqu'on ne sait jamais quel visage aura l'amour au moment de Le rencontrer (puisque l'humeur<br /> du jour bon ou mauvais le décidera...) Proust est "impitoyable" envers lui-même, déjà, mêlé de sentiments divers... qui firent sa métempsychose....<br />
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P
<br /> <br /> Bonne analyse.<br /> <br /> <br /> Vous n'avez pas commenté encore les articles précédents ( intempéries ? ).<br /> <br /> <br /> <br />

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