Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Recherche

4 avril 2012 3 04 /04 /avril /2012 20:12
On ne peut pas commander d’aimer, ordonner un sentiment, discussion de Kant sur le christianisme.
Commençons par les « objections » que Kant fait à la doctrine de l’amour que l’on trouve dans le christianisme. Mais rappelons l’originalité de celui-ci par rapport au judaïsme. Ce dernier comporte traditionnellement six cent treize et non pas seulement dix commandements. Le christianisme les réduit à deux : aimer Dieu, aimer son prochain. Cette deuxième expression fait penser à un des commandements du Lévitique ( XIX, 18 ) « Aime ton proche comme toi-même » mais là aussi la différence est manifeste, il s’agit de l’ami, du proche. Car le « prochain » au contraire a une extension considérable puisqu’il englobe l’être humain le plus hostile : « Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent » ( Matthieu, V, 44 ). On retrouve cette insistance sur l’amour chez Paul : « Si je n’ai pas l’amour, je ne suis rien. L’amour excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout » ( Première Épître aux Corinthiens, XIII, 7 ) et chez Augustin : « Aime et fais ce que tu veux ».
Kant énonce une première « objection » à ce commandement de l’amour : « l’amour comme inclination ne peut pas se commander », il relève du sensible, du « pathos », du « pathologique » ( au sens étymologique de « passion » ). Tout ce qu’on peut ordonner, c’est de faire le bien par devoir ( Fondements de la Métaphysique des Mœurs, première partie ). La deuxième « objection » est la suivante : il faudrait être un saint et non un homme pour que notre sentiment coïncidât inéluctablement avec la loi morale, qui se présente toujours sous la forme d’une contrainte. La sainteté est inaccessible au commun des mortels, c’est un idéal valable mais qu’on ne peut atteindre ( Critique de la Raison Pratique, chap.III, Des mobiles de la Raison Pure Pratique ).
Key word
: doctrine de l’amour, christianisme, judaïsme, les commandements, le proche, le prochain, aimer ses ennemis, si je n’ai pas l’amour je ne suis rien, l’amour excuse tout, aime et fais ce que tu veux, le pathos, l’amour comme inclination, le saint, la sainteté inaccessible.
Key names
: Kant, Augustin; Matthieu, Paul, Jean.
Key works
: Fondements de la Métaphysique des Mœurs, Critique de la Raison Pratique ( Kant ), Traité sur la Première Épître de Saint Jean ( Augustin ); Lévitique, XIX, 18; Matthieu V, 44; Première Épître aux Corinthiens, XIII, 7 ( Paul ); Première Épître de Jean, IV, 7 : « Dieu est amour ».
L’île de notre nostalgie ( 2.3.h ).
Patrice Tardieu
Partager cet article
Repost0

commentaires

J
<br /> Très cher Patrice Tardieu,<br /> C'est tout là l'objet de ma confusion à la lecture du commentaire de Saint-Songe... nous ne parlions pas de la même chose, je l'ai compris après.<br /> Jeanne<br />
Répondre
P
<br /> <br /> Effectivement.<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> Là, vous dites un peu autrement, et pour preuve vous ajoutez "au amour-désir-manque", ce qui en fait la grande différence. Or, j'avais compris dans votre autre commentaire que vous faisiez<br /> aboutir charnellement cet amour, de fait vous le condamniez à 6 mois , tandis que moi je parlais d'un amour platonique.<br /> Du coup, là, je suis de votre avis comme celle de Proust, bien évidement ; l'amour dure s'il reste dans le manque, et ce, grâce au désir inassouvi et si l'objet de l'amour est<br /> inatteignable.<br /> Décidément, le langage (écrit, surtout) est retors car il est bien difficile de se faire comprendre d'autrui... (par ailleurs, sur l'émission des NCC consacrée à "Walter Benjamin (3/4)" du<br /> 5.04.12, un fidèle auditeur explique parfaitement bien, dans son commentaire, le rôle langage, selon Barthes...) !<br /> Bien à vous,<br /> Jeanne<br />
Répondre
P
<br /> <br /> Très chère Jeanne,<br /> <br /> <br /> je pense qu'il faut bien distinguer l'amour selon Platon et l'amour "platonique".<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> Si si, d'âme Jeanne, Proust est de mon  côté, si vous relisez ses lettres au sujet de cette fameuse "durée" psychopathologique... liée au amour-désir-manque (tout amour qu'on désire , tant<br /> qu'il manque, il dure éternellement, sitôt l'a-t-on, mignon téton, curieusement et chimiquement, le cerveau, lui, il désire autre puisque le manque du premier amour n'est plus...Possible que<br /> notre hôte en dise un peu plus...Je me base aussi sur mon expéri-mental, dame !...J'ai pris la mesurette du coeur, et ce chiffre de "six" apparut étrangement ; de plus, par l'amour physique,<br /> j'eus un fils : simon (six mois, voyez, curieux non ? Preuve éternelle !)<br />
Répondre
P
<br /> <br /> C'est la thèse de Platon du désir comme manque.<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> - C'est curieux cette histoire de durée, certains comme saint-songe disent qu'au bout de 6 mois l'amour n'est plus ce qu'il était, quand d'aucuns disent qu'au bout de 2 ans la passion s'éteint ou<br /> quelque chose comme ça... Moi, cela m'amuse parce que je ne vois pas comment quantifier en durée, voire rationaliser, un sentiment qu'on a déjà du mal à cerner. Je crois qu'à ce niveau là l'on<br /> sait, par expériences personnelles, que l'amour se vit tout simplement, et que pas un amour ne ressemble à un autre amour, sans parler que ce sentiment-là a la durée qu'on veut bien lui<br /> donner.<br /> <br /> - Il est bien vrai que l'amour ne se commande pas, parce qu'il se ressent !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
P
<br /> <br /> La quantification des biologistes est de trois années pour que l'enfant puisse survivre !<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> Proust souligne dans une de ses correspondances avec une certaine suzette, je crois : "qui vous a dit qu'aimer était faire plaisir à l'autre" ? (ou : dire oui à tout prix aux désirs de<br /> l'autre)... Puis Oscar Wilde répond à votre seconde moitié de billet : "pardonnez toujours à vos ennemis, rien ne les agace autant"... Force est de reconnaître qu'on ne sait pas ce qu'est<br /> vraiment l'amour, ce sentiment qui n'aurait que "les intermittences du coeur"..., et qui ne viendrait pas du coeur, lui-même, puisque tout est affaire de moments, de situations, de stratagèmes<br /> amoureux.... de séduction, d'éducation puis de rupture (au bout de six mois, souvent, cela tangue..., même Proust le faisait remarquer à un de ses amis : dis, ça fait six mois qu'on se connaît,<br /> et on ne s'est pas fâché, il faut penser à se fâcher..."...(ou quelque chose d'approchant, je cite de mémoire)<br />
Répondre
P
<br /> <br /> Difficultés de l'amour...<br /> <br /> <br /> <br />

Articles RÉCents

Liens