Mais peut-on dire qu’Ingres s’identifie au fils ? Nous avons le témoignage précieux de Raymond Balze qui peignit tout le fond du tableau de 1840 et acheva, à la mort du maître, celui de 1866. Ingres mimait à la perfection et sans crainte du ridicule, étant donnée sa corpulence, le personnage du père, Seleucos, pour servir de modèle (les élèves et condisciples d’Ingres ont toujours pris une part active dans ses oeuvres ; ainsi les fonds du portrait du peintre François-Marius Granet auraient été exécutés par Granet). Plus étonnant encore : c’est Mme Ingres qui joua le rôle du médecin très masculin et le peintre Hippolyte Flandrin, celui d’Antiochus allongé, que nous avions confondu avec une femme !
Cependant qui prit l’attitude pour l’idole ? Personne ! Il s’agit d’un marbre antique des Giustiniani, dit « la Pudicité », qu’Ingres avait copié durant son séjour à Rome et qu’il réutilisera dans son célèbre portrait en pied de la Comtesse d’Haussonville, à la longue robe ondulante de satin gris-bleu déployant sa magnificence. Il existe encore un très beau dessin du drapé de Stratonice au crayon noir et estompe sur papier beige, dont Degas s’inspirera sans doute. Le visage de l’idole ressemble à celui de la Fornarina, simple fille d’un boulanger, qui posa pour Raphaël et qu’il aima. Ingres représenta plusieurs fois cette intimité du peintre romain et de son modèle. David, qui avait eu le prix de Rome en 1774 avec un tableau intitulé Erasistrate découvrant la cause de la maladie d’Antiochus et chez qui Ingres avait étudié, avait représenté le peintre Apelle amoureux de son modèle Campaspe, maîtresse d’Alexandre le Grand (macédonien comme Démétrius) qui la lui avait finalement cédée 4 ! Une autre source pouvant être le tableau de Poussin la mort de Germanicus pour la gestuelle des personnages.